samedi, janvier 30, 2010

Le ciel est couleur du miel

C’est dimanche aujourd’hui. L’air est couleur du miel.

Enfin, couleur du miel liquide, parce qu’il fait une chaleur toïde sans le moindre souffle d’air.

Ernest est assis sur une chaise de jardin. Dans son jardin. Il faut dire, pour la bonne compréhension du récit, qu’il n’utilise ses chaises de jardin que dans le jardin. A l’intérieur, il a d’autres chaises. Bon, d’accord, peu importe.

Ernest somnole avec un chapeau de paille sur la tête. Ainsi, il ne risque pas l’insolation. Du moins, le pense-t-il. Il ne se soucie pas d’avantage de la vipère qui s’approche silencieusement de son pied. Ni de l’orage qui va éclater d’un instant à l’autre. Le ciel est noir du côté des vignes, mais Ernest somnole et ne voit rien de tout cela. Il rêve.

Il rêve aux ruches de son enfance, quand il accompagnait son papa pour vérifier le travail des abeilles. Les abeilles sont travailleuses, mais vois-tu, Ernest, lui disait son papa, il faut les surveiller. On a déjà vu des ruches à côté desquelles la maison de Monsieur Capharnaüm paraitrait un modèle de rangement. D’autres ressemblent à de vrais lupanars. On ne sait pas tout de la vie sexuelle des abeilles. Certaines sont particulièrement dépravées et mènent une vie à côté de laquelle celle de Patachon en personne aurait semblé une véritable existence monacale. Hein ? Bon d’accord, peu importe.

Il rêve aux ruches de son enfance parce que le ciel est couleur du miel et qu’il sent le miel. Une personne trop affairée ne sent pas ces choses-là mais une personne qui somnole, si.

Ernest est tellement bien dans son rêve qu’il n’entend pas les petits cris de Ginette qui le trompe avec Roger. Entre Ginette et Roger, ce fut le coup de foudre. Le coup de foudre a ceci de particulier, qu’il autorise ceux qui s’en trouvent atteints, à brûler les étapes du flirt dans de prodigieuses proportions, et ce sans que personne y puisse trouver à redire. Sauf Ernest, bien entendu. Je ne sais si vous avez déjà vu « la femme de Feu », mais à côté de Ginette, la femme de Feu ferait plutôt penser à un pâle iceberg. Oui, bon, d’accord.

Quant à Roger ! Il y aurait beaucoup à dire sur Roger, mais là, je n’ai pas le temps.

Où en étais-je ? Ah, oui ! La foudre.

Lorsque la foudre claqua, un coup de tonnerre d’une rare violence fit trembler toute la vallée. Ernest tomba de sa chaise. La vipère, étonnée, changea de direction et pénétra dans la maison.

En rentrant chez lui, Ernest trouva Ginette complètement déshabillée par la violence du choc. Il en était de même de Roger, venu pour lui rendre visite. L’énergie électrique les avait précipités pêle-mêle sur le lit.

Enfin, c’est ce qu’a dit Roger avant d’être mordu par la vipère.

Quand il reviendra de l’hôpital, s’il revient, Ernest compte bien lui demander des précisions sur cet étrange phénomène.

3 commentaires:

chris a dit…

étrange histoire ! mais j'aime bien .

Olivier de Vaux a dit…

Pas facile de s'y retrouver dans tes blogs ; j'ai failli ne jamais trouver celui là, et ç'eût été fort regrettable, ma foi.
Petite question : pourquoi 1 phrase = 1 paragraphe ?
J'aime bien l'ambiance, les personnages, le côté dépouillé, minimaliste et dense.

Solange a dit…

Les orages sont dévastateurs à cet endroit. Pauvre Ernest!